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L’intelligence artificielle regarde vers les étoiles

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Introduction

Les intelligences artificielles sont de plus en plus présentes dans la vie quotidienne, puisque nous les retrouvons dans les moteurs de recherches, dans les algorithmes YouTube ou sur les sites de streaming.
Elles sont aussi utilisées dans les sciences spatiales et astronomiques pour détecter des exoplanètes lors de transits devant leur étoile ou via des lentilles gravitationnelles.

Le Projet

I. On entend quoi par intelligence artificielle ?

L’histoire de l’intelligence artificielle (IA), notamment des robots, ces êtres mécaniques pouvant bouger d’eux même, remonte à loin, très loin. C’est notamment durant l’Antiquité grecque qu’est apparue pour la 1re fois l’idée d’un être artificiel intelligent : Talos.

Sans vous narrer toute l’histoire et le développement de l’intelligence artificielle, qui serait ô combien intéressante [1], je mentionnerais simplement, que les avancées technologiques les plus importantes en termes d’IA ont été réalisé ces dernières dizaines d’années. En effet, le fondement de l’informatique moderne est souvent attribué à Alan Turing (milieu 20e). Et c’est grâce au piliers de l’informatique moderne qu’a pu réellement émerger l’IA.

Qu’est-ce donc que l’IA ? Selon Wikipédia, l’IA est l’intelligence dont font preuve les machines. Ceci correspond à la perception, la synthétisation et la déduction d’information, capacité dont les animaux, humains et non-humains, sont capables mais qui pour une IA devient une tâche ardue. Par exemple, l’ouverture d’une poignée de porte est d’une grande complexité pour une IA. Les tâches des IA dont leurs capacités sont démontrées correspondent à la reconnaissance vocale, la vue, la traduction entre langues naturelles, etc. Autrement dit, l’IA est un ensemble de techniques qui permet d’imiter, voire dans certains cas d’améliorer, l’intelligence animale.

Ceci défini, vous commencez peut-être à apercevoir l’omniprésence des IA ! Sans parler de tout ce qui existe dans les livres, au cinéma ou dans les jeux vidéos. Pour vous donner seulement quelques exemples emblématiques, nous avons :
- tous les systèmes de moteur de recherche : Google Search, DuckDuck Go, Bing, …
- le système de recommandation sur Youtube ou Netflix,
- Deep blue pour le jeu d’échec et Alpha GO plus récemment pour le jeu de Go

Il y a aussi des IA qui servent à supprimer des bruits de fonds, générer des textes ou des images, des aide à la création de blogs, les « chat-bots » pour les services clients… Et la liste serait encore bien longue.
Tout ça pour dire que de nos jours, lorsqu’elle ne font pas l’actualité médiatique, elles sont tout de même sous-jacente à beaucoup de nos activités quotidiennes. Mais pas que ! Les IA sont également très utiles dans les sciences et notamment en astrophysique.

II. Comment ça fonctionne ?

Avant de comprendre son intérêt, très pertinent en astrophysique, nous avons besoin de comprendre un peu son fonctionnement.

Sans refaire l’historique de l’étude et de l’évolution de l’IA, le « machine learning » (ML) a été considéré à partir des années 1990 comme un champ d’étude à la fois inclut dans la recherche en IA et à la fois à part. Je vais m’atteler à décrire assez simplement comment fonctionne le ML et notamment une sous-section du ML qui est l’apprentissage profond (« Deep Learning » ; DL). De nombreuses applications existent dans la détection d’ondes gravitationnelles ou de molécules atmosphériques pour les exoplanètes par exemple. En fonction de son objectif, le ML est généralement classé en 3 approches dont les applications sont différentes.

Différentes approches de Machine Learning (ML)

La première approche sert plutôt à chercher des liens qui existent entre les données en entrée et les données en sortie. Un « enseignant » va « donner » des indications sur ce que sont les données qui vont entrer dans la machine et ce que l’on veut obtenir d’elles à la fin. Par exemple, on va rentrer dans la machine une grande quantité d’images de pommes et de poires et lui dire quel est chaque objet. Le but étant à la fin que la machine, lorsqu’on lui présente l’image d’un objet, soit capable de dire si c’est une pomme ou une poire.

La deuxième approche est l’apprentissage non-supervisé. Comme son nom l’indique, on va injecter des données dans la machine et elle va se débrouiller toute seule et doit trouver un lien entre toutes les données qui lui ont été fournies. Pour reprendre notre exemple précédent, on va fournir à la machine des images de pommes, de poires et de citrons, et elle va regrouper, les images qui se ressemblent ensemble. Même sans savoir ce qu’est une pomme ou un citron, elle pourra séparer un citron d’une pomme.

Et enfin, la dernière approche utilisé dans le ML c’est de l’apprentissage par renforcement ; très similaire à l’apprentissage chez les animaux et les humains. Prenons l’apprentissage de la marche par exemple. Ce qui paraît naturel et normal pour un adulte ne l’est pas du tout pour un nourrisson. Quand il va tenter de se tenir sur ses deux jambes, il va recevoir des retours en fonction de la position de ses pieds, de ses genoux, son torse, etc qui vont lui permettre de « savoir » s’il se tient droit ou non. Au fur et à mesure des essais-erreurs, et en modifiant la position des différentes parties de son corps, le bébé va pouvoir être en mesure de se tenir droit.

Scénario d’apprentissage par renforcement

Le même processus va ensuite se mettre en place lorsqu’il va vouloir apprendre à mettre un pied devant l’autre et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’il soit capable de marcher correctement sans tomber.
C’est exactement l’idée qu’il y a derrière l’apprentissage par renforcement en IA. Elle va chercher à maximiser et optimiser les comportements « positifs » grâce à des retours positifs et négatifs. Pour la conduite des voitures autonomes, si la voiture rentre dans un mur c’est un retour négatif, si elle roule près d’un trottoir sans le toucher, c’est un retour positif.

Deep Learning (apprentissage profond en français)

L’apprentissage profond est basé sur des principes de réseaux de neurones artificiels. Pour faire très très simple, ce sont des fonctions mathématiques qui vont transformer leurs données d’entrées en des représentations informatiques abstraites pour nous les humains. Le terme « profond » (« deep » en anglais), se réfère aux nombreuses couches que vont traverser les données pour leur transformation. Pour la restauration d’une image par exemple, la 1re couche va encoder les pixels et leur attribuer des valeurs en fonction de leur brillance. La 2e couche va détecter les bords de l’objet du décor de fond. La 3e va reconnaître qu’il y a un visage, et ainsi de suite.

Et c’est principalement ce type d’apprentissage qui est utilisé en astrophysique, notamment les réseaux de neurones artificiels.

Il y aurait par ailleurs encore énormément de choses à dire sur le sujet et de rentrer beaucoup plus en détails sur le fonctionnement des réseaux de neurones, leurs différences et bien d’autres caractéristiques. Je mentionne tout de même le billet de blog de l’excellente vidéo de la chaîne Youtube « Science étonnante » qui explique brièvement les réseaux de neurones et un peu ce qui se cache derrière des générateurs d’images comme Stable Diffusion ici

Schéma montrant le positionnement des notions d’IA, machine learning et deep learning imbriquées les unes aux autres.

III. Intérêt et comment on s’en sert en astrophysique

Il existe donc une quantité impressionnante de l’utilisation de l’IA dans des domaines tous plus variés les uns que les autres. Ce qui nous intéresse aujourd’hui plus particulièrement dans cet article, c’est l’utilisation d’IA, notamment du ML et DL dans l’exploration spatial et l’astrophysique.

Exploration de Mars

Commençons d’abord par l’exploration spatial et plus précisément de l’exploration de Mars. En effet, l’un des derniers rovers martiens (Perseverance [2]) possède à son bord plusieurs instruments qui ne nécessitent pas ou peu l’intervention humaine. Par exemple, le rover est capable de repérer tout seul les sites les plus intéressants à investiguer.

Vu de Mars par l’instrument Aegis de Curiosiy
Curiosity choisit des cibles intéressantes : les cibles en bleu sont rejetées, en rouge, elles sont retenues. Les cibles les plus intéressantes sont en vert

Il récupère aussi énormément de données et se « programme » lui-même pour envoyer les données vers la Terre, minimisant ainsi les erreurs humaines de planification ainsi que les possibles pertes de données.
Ces applications permettent notamment de maximiser le temps de récolte de données et permet d’éviter les délais (qui peuvent être très long) entre l’envoi d’une commande au rover (passée depuis la Terre), sa réception et la confirmation de sa mise en place.

Autonomie des satellites

Depuis 1957, lancement du 1er satellite artificiel Sputnik-1, l’augmentation des satellites lancés chaque année n’a fait qu’augmenter jusqu’à nos jours (environ 8000 en 2021 [3]).

Les 72 plans orbitaux occupés par les 1 584 premiers satellites Starlink.

Beaucoup sont retombés sur Terre, mais la plupart restent en orbite. Ce qui sous entend que la place disponible dans l’environnement proche de la Terre devient de plus en plus réduit. Ce qui implique donc que les probabilités de collisions augmentent de plus en plus. Pour les éviter, un satellite doit pouvoir devenir autonome dans ses manœuvres d’évitement [4] par exemple. Ou encore créer une cohésion d’ensemble pour les constellations de satellites. Tout ceci est possible seulement car les satellites sont dotés d’IA qui leur permet d’agir et de modifier leur trajectoire en cas de « danger » pour eux.

Cosmologie

« Gravity Spy » est un outil qui permet de classifier les « glitches » dans les données de mesure des ondes gravitationnelles. Ces dernières sont des déformations de l’espace-temps dûes à la coalescence d’objets denses tels des trous noirs ou des étoiles à neutrons [5].

Pour ce faire il utilise du ML ainsi que les citoyens qui peuvent entraîner l’IA. En effet, les détections d’ondes gravitationnelles sont d’une précision infime (de l’ordre de ± 2 × 10−18 m en 2016), bien plus petite que la taille d’un atome ! Ce qui veut dire que les appareils de mesure (LIGO, VIRGO) doivent avoir le moins de bruits possible, bruits liés aux vibrations sismiques ou aux instruments eux-mêmes.

Et pour détecter et comprendre les signaux reçus il est nécessaire d’avoir une profonde compréhension du « bruit de détection » [6], [7].
C’est ainsi que l’utilisation d’IA avec du DL permettent d’augmenter les capacités de traitement des données que ne pourrait pas faire l’être humain en des temps « courts ». l’IA peut faire ça en seulement quelques jours alors que si les humains analysaient, ça pourrait prendre des semaines.

Par ailleurs, les personnes qui veulent aider à la classification de ses « glitches » et à entraîner l’IA dans la classification, font à peu près la même chose que l’IA tout en permettant d’améliorer ses données d’entraînement et donc sa précision de détection.
Pour participer à ce projet pour de la Science participative, je vous invite à aller voir ici : https://www.zooniverse.org/projects...

Chasseurs d’étoiles et de planètes

L’une des particularités de la plupart des modèles de ML, est qu’ils sont capables de créer des distinctions entre différents types de données, créer d’autres modèles et de nouvelles données. Les modèles de générations qui créer des données artificielles (qui sont fabriqués de toutes pièces et ne sont pas des détections) sont basés sur les mêmes phénomènes physiques permettant d’entraîner les modèles. Ainsi, ils peuvent permettre de prévoir comment nous pourrions détecter dans les données, certaines molécules, les lentilles gravitationnelles, des exoplanètes, ... [8]

1. RobERt (Robotic Exoplanet Recognition) [9]

La recherche astronomique est rentrée, depuis bien des années déjà, dans une période des « Big Data ». En effet, les télescopes terrestres et spatiaux sont de plus en plus grand et surtout sensibles et produisent ainsi une quantité de données de plus en plus importante et difficile à exploiter par les humains.
Pour ce faire, le Dr. Ingo Waldmann et son équipe ont créée un « deep net » RobERt (Robotic Exoplanet Recognition) capable de reconnaître diverses molécules dans les atmosphères d’exoplanètes. Ils l’ont entraîné en utilisant 85 000 courbes de lumière de 5 classes d’exoplanètes. L’entraînement de RobERt a permis de détecter des molécules tels que l’eau, le dioxyde de carbone, l’oxyde de titane et l’ammonium avec une précision de 99,7 % !
Ce qui prenait auparavant des jours pour trouver cette information « manuellement », RobERt le fait beaucoup plus rapidement. Il peut aussi être utilisé dans l’autre sens, c’est-à-dire qu’à partir de son entraînement, RobERt est capable de prédire à quoi pourrait ressembler des atmosphères d’exoplanètes détecter par le James Webb Telescope.

Reconstitution spectral « rêvé » par l’IA RobERt
Le graphique montrent une comparaison entre des spectres reconstruits et normalisés par l’IA pour les molécules de H20, CO2 et TiO (haut) et des spectres réels de détection de ces molécules
2. Micro-lentille gravitationnelle

Le phénomène de lentille gravitationnelle est dû à la présence d’un corps massif, situé entre la Terre et une source lumineuse derrière ce corps, qui courbe l’espace-temps. La trajet rectiligne de la lumière est déformé créant ainsi plusieurs images d’un même objet. [10]

Dans la détection d’exoplanète, il existe un phénomène similaire appelé micro-lentille gravitationnelle. La lumière d’une étoile lointaine va être magnifiée par le passage d’une exoplanète dans la ligne de visée, créant ainsi un pic lumineux sur la courbe de lumière.

La géométrie d’un événement de micro-lentille gravitationnelle
Vu depuis la Terre (gauche), un système planétaire se déplace devant une étoile (source, à droite) et courbe la lumière provenant de cette étoile la faisant apparaître 10 à 100 plus lumineuse. Il apparaîtra alors un pic sur la courbe de lumière.

Grâce à une immense librairie de courbes de lumière, les astronomes ont développé des IA utilisant le ML qui ont ainsi pu dépasser les capacités humaines dans la détection des exoplanètes. Et même plus que ça, le ML a révélé des mathématiques sous-jacente permettant une compréhension plus profonde des phénomènes de micro-lentilles. [11]

Conclusion

Que ce soit dans la coordination de satellites, dans l’exploration de Mars, pour la recherche d’exoplanètes ou bien encore dans l’étude des ondes gravitationnelles, l’utilisation de l’IA en astronomie a vraisemblablement un bel avenir devant elle. En ce qui concerne le domaine du spatial, le DL à encore une longue route à parcourir avant de pouvoir l’utiliser réellement intensément [4].
Dans le milieu de la recherche en astronomie, l’IA nous sert quasi-exclusivement à traiter une quantité gargantuesque de données que nous ne savons plus traiter « manuellement » ou alors ça nous prendrait des mois et des mois.
Et même si nous ne nous en rendons pas compte, les systèmes d’IA sont déjà bien installés et cela ne fera sans doute que croître à l’avenir, mais jusqu’où ? C’est sans doute une question pour un prochain article.

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